À la découverte de la laisse de mer avec Ystopia
Dans le cadre de nos activités relatives à la protection du milieu marin, nous avions pris rendez‑vous en ce jeudi 22 mai sur la plage de Trezmalaouen avec des
membres de l’association Ystopia.
Amandine Le Moan, Capucine Lees et Oestebann Troadec nous ont aimablement accueillis dans la charmante petite maison « Ty Trezma » aux volets bleus nichée sur la
dune au-dessus de la plage.
Pour Ystopia, accueillir des membres d’une association de plaisanciers constituait une première.

Zoom sur Ystopia
Fondée en 2020 par Amandine, l’association Ystopia agit à Douarnenez et ses environs pour la préservation de l’océan en engageant la population à mieux connaître et
prendre soin du vivant avec lequel nous cohabitons.
L’association organise plusieurs activités dans le but de faire découvrir au plus grand nombre les êtres vivants de la biodiversité marine locale et imaginer
collectivement des actions pour limiter l'impact des activités humaines sur le milieu marin : ateliers participatifs, conférences-actions, expositions, projections-débats en collaboration avec
les structures locales et experts des thématiques abordées.
Pour plus d’informations, nous vous invitons à consulter le site internet de l’association : https://www.helloasso.com/associations/ystopia

Attention ! Vous marchez sur des œufs
Les présentations étant faites, le groupe s’élance sur la plage à la suite d’Oestebann, jeune animateur nature technicien biologiste en environnement, pour une
balade découverte de la laisse de mer, cet espace de l’estran où viennent s’échouer diverses matières, les unes naturelles comme les algues et les coquillages et les autres indésirables et
polluantes comme les inévitables plastiques.
Après seulement quelques pas sur le sable, Oestebann nous interroge : « savez-vous ce que sont ces demi-lunes posées sur le sol ? ». On pense d’emblée à
d’innocentes traces sableuses laissées là par un quelconque animal, ver ou coquillage. En réalité, ces rubans spiralés sont des œufs déposés par un escargot marin perceur appelé « natice ». Il
agglomère ses œufs en bande à l’aide d’un mucus gélatineux se mélangeant avec le sable. Il arrive même que ces objets soient confondus avec du caoutchouc par les promeneurs lors des opérations de
ramassage. Compris. On ne fera pas l’erreur et on évitera si possible de les transformer en omelettes !
Des habitations troglodytes sur la falaise
Oestebann nous invite ensuite à lever les yeux et observer de multiples cavités creusées sur le bord de la falaise surplombant la plage. Il s’agit, nous explique-t-il, de nids troglodytes réalisés par une colonie d’hirondelles de rivage. Nous restons à bonne distance pour ne pas les déranger et reprenons notre chemin vers les rochers qui séparent Trezmalaouen de la plage du Ris.

Cessons de faire gicler les « pissous »...
Lequel d’entre nous ne s’est pas innocemment amusé à appuyer sur les « pissous », ces masses gélatineuses et lisses fixées aux rochers afin de provoquer un jet
d’eau ? Si le geste amuse petits et grands, en revanche il est fatal à l’actinie rouge ou anémone tomate qui avait rétracté ses tentacules pour résister à la déshydratation. Promis, on arrête de
jouer à touche pipi !
… et d’écraser les récifs d’HLM
Lors de nos parties de pêche à pied, lorsque nous escaladons les rochers humides et glissants, nous prenons parfois prudemment appui sur des sortes de concrétions fort opportunément posées là pour nous éviter de « dévisser ». Oestebann nous explique que ces « choses », apparemment sans vie, sont en réalité des tubes agglomérés et que ces structures en nid d’abeille constituent de véritables récifs dans lesquels une riche microfaune vient se nourrir et se nicher.
Ces bio-constructions sont l’œuvre d’un ver marin, l’hermelle, qui les réalise en collant grains de sable et fragments de coquillages. À marée haute, les récifs d’hermelles sont des zones de nourriceries pour de nombreuses espèces de poissons et à marée basse, elles attirent les oiseaux du littoral. Désormais, nous serons encore plus attentifs à l’endroit où nous poserons les pieds aux abords des « poulics ».

Le ver marin qui donne son sang
Après cette (trop) courte promenade et s’être donné bonne conscience en glanant quelques déchets plastique, Amandine nous invite à prendre une collation à « Ty
Trezma ».
En se serrant bien, nous prenons place autour de la table sur laquelle sont disposées des cartes de jeu.
Pendant que les boissons sont préparées et servies, Martine évoque avec passion l’aventure humaine et scientifique de Franck Zal, docteur en biologie
marine.
En 2007, ce dernier décide de quitter le CNRS et fonde Hemarina, un laboratoire biopharmaceutique implanté à Morlaix et spécialisé dans le développement de produits
de santé reposant sur les formidables propriétés de l’hémoglobine extracellulaire du ver marin arénicole.
Longtemps ignoré par les instances françaises, Franck Zal a été obligé de se tourner vers l’étranger, notamment l’Europe et les États-Unis. Pourtant, les potentiels
débouchés liés au « plasma » de l’arénicole sont nombreux et très prometteurs.
Finalement, en 2018, Franck Zal est élu Breton de l’année et Hemarina est consacrée entreprise innovante.
Grâce à Hemarina, l’arénicole est devenue le premier transporteur d’oxygène universel à visées thérapeutiques. Pas mal pour un modeste ver de vase qui nous sert
seulement d’appât, à nous pêcheurs.

Ok pour jouer mais... sérieusement
Après cet éclairage instructif, c’est le moment pour Capucine, la stagiaire de l’équipe, de nous proposer de participer, en avant-première, à un jeu dit sérieux
qu’elle a conçu et réalisé dans le cadre de ses études en Master 1 environnement littoral à l’IUFM de Brest.
Les participants sont invités à constituer des binômes. Et à chaque binôme est attribué un rôle en lien avec les activités maritimes de la baie (pêcheurs de loisir
et professionnels, parc marin, plongeurs, gestionnaire de port et même banc d’herbes marines).
Chacun prenant son rôle au sérieux (d’où le qualificatif du jeu), s’ensuit un échange de vues tous azimuts qui permet de mesurer la complexité des questions
environnementales au regard des contraintes et des attentes des différents acteurs de la baie.

C’est sur cette touche finale ludique et conviviale que se termine notre visite à « Ty Trezma ». Et même si la récolte de déchets ne restera pas dans les annales,
les participants ont unanimement apprécié leur rencontre avec Ystopia, satisfaits d’avoir pu découvrir certains des nombreux petits secrets de la laisse de mer.
Un grand merci à Amandine, Oestebann et Capucine pour leur accueil chaleureux et le partage enthousiaste de leurs connaissances.
